Chaque jour son lot de dérapages financiers scandaleux ......Merci au Canard enchaîné pour sa veille permanente.
A la poursuite d'une association de bienfaiteurs
DEMISSION du directeur administratif et financier, coup de gueule des bénévoles, lettre ouverte des salariés, qui tous exigent plus de transparence. Depuis des mois, c'est un avis de tempête qui
est lancé à l'association caritative Aide et Action, dont l'assemblée générale se tiendra le 19 juin à Paris. Un audit saignant du cabinet Syndex a mis en cause son fonctionnement et l'opacité de
sa gestion
« Le Canard » a déjà raconté les boursicotages hasardeux des dirigeants avec l'argent des donateurs. « La faute à la crise », se défend la direction, qui doit à présent faire face à une
contestation de ses choix et de son train de vie. L'association espère le renouvellement de son habilitation au « Comité de la charte », sorte de label de bonne conduite délivré aux ONG faisant
appel à la générosité publique. Le changement de statuts et une délocalisation en Suisse, alors que 80 % des fonds viennent de France, posent quelques questions.
A l'origine, Aide et Action, agréée par l'Éducation nationale et reconnue d'utilité publique, c'est une chouette idée, plutôt originale: s'occuper des enfants de pays pauvres en parrainant un
gamin, voire une classe dont la famille suit les progrès via des échanges de correspondance. Le système a séduit 57 000 parrains dans 24 pays. Et ceux qui versent une somme chaque mois, parfois
depuis des années, seront sûrement ravis de savoir qu'avec leurs dons l'équipe dirigeante s'est offert, par exemple, une magnifique séance de rodéo dans les dunes de Dubaï, où avait été
délocalisé le comité de direction. C'est si exotique.
En cinq ans, l'argent consacré aux directions générale et régionales est passé de 2,6 à 8,: millions. La directrice émarge à 7 500 euros net par mois. La secrétaire générale à 6 000. Boutin n'est
pas la seule à aimer les pauvres.
En revanche, il y a de la coupe franche dans les budgets d'assistance. Celui attribué à Madagascar a été divisé- par deux « à cause de la situation politique », argue Claire Calosci, la
directrice. Pendant des années en Afrique, 389 écoles, autrefois soutenues, n'ont reçu aucune aide, en dehors de quelques courriers. Là encore, l'explication est toute trouvée : « C'est le
changement du mode programme en mode projet » (sic) qui a provoqué ce « dysfonctionnement ».
Cela n'entame pas la bonne humeur de l'équipe au pouvoir, qui a tout d'une famille unie. Après avoir rémunéré son mari pour des missions (8 271 dollars par-ci, 8 547 dollars par-là), la
directrice a embauché le fils de sa belle-mère puis le neveu du président. Son amie, la trésorière, a recruté sa propre fille. Ces braves dirigeants voyagent en classe affaires, au grand dam des
salariés. Mais la directrice a un certificat médical. Mal de dos.
Quand deux cadres ont suggéré qu'au moins les « miles » obtenus grâce à ces expéditions soient mis au pot commun de l'association, ils se sont fait remettre à leur place. Depuis, tous deux ont
été virés. Avis aux gêneurs.
Brigitte Rossigneux
Le Canard Enchaîné du 16/06/2010